mardi 21 juillet 2015

Playlist #1: La Vie Devant Soi





Tous les matins en ouvrant mes fenêtres, j'ai face à moi cet immeuble HLM  kitsh (voir cover de la playlist ci-dessus ) des années 70 voir 60, jumeau symétrique de celui duquel j'ouvre mes fenêtres.
Depuis que nous avons emménager dans cette résidence il y a maintenant 8 ans je crois, j'ai trouvé ces immeubles moches. Pour être moche ils le sont toujours, mais je me suis tant attachée à eux que finalement je trouve dans le blanc de ces murs devenus gris et dans ces jaunes et roses délavés un certain charme pittoresque. Nous n'étions pas censées rester longtemps, on devait déménager rapidement, l'année prochaine, la suivante, celle qui suit...Finalement nous y sommes toujours mais le déménagement est toujours "bientôt" dans mon esprit. J'ai été habituée depuis toute petite aux déménagements, d'abord ce fut d'un pays à un autre, ensuite d'un quartier à un autre, en gardant toujours très peu de liens ou quasiment aucun avec la vie et les gens que j'avais pu fréquenter alors. Le déménagement s'associe ainsi dans mon esprit à un nouveau déracinement, à une nouvelle vie ou celle qui a précédé ne deviendrait que des souvenirs d'un passé lointain comme vécu dans une vie antérieur. Il y a quelques années, je me sentais encore capable d'opérer le même schéma, sauf que maintenant tout est différent, j'ai pris une nouvelle habitude, celle de vivre dans cet immeuble, dans cette résidence, dans ce quartier. De la même manière que je me suis attachée à ces immeubles, je me suis attachée aux personnes qui y vivent. J'en connais bien sûr même pas 20% et la majorité, nos relations s'arrêtent à des "Bonjour""Bonsoir" cordiaux, et encore. Mais, j'ai l'impression de les connaître parce que je les vois quotidiennement. Je suis témoin des rides qui s'installent petit à petit sur le visage de certains, de la mort qui s'incruste vicieusement chez d'autres, de la prise de poids d'un tel et la perte surprenante d'un autre,des enfants que j'avais connus encore tout petits et qui sont maintenant des pré-adolescents, de l'arrivée de nouveaux voisins, du départ jamais réalisé d'autres, du silence méditatif de la dame toujours dehors avec son berger allemand, des réprimandes de celui que je nomme le vieux Salamano à son chien, de l'homme toujours en roller accompagné de son petit chien...Beaucoup de solitude et de vieillesse ici, donc beaucoup de chiens. De toutes tailles, de toutes races, bref un enfer pour l'enfant ayant une peur atroce des chiens que j'étais, mais l'habitude, l'habitude à encore frappée. C'est encore loin d'être l'amour fou entre ces animaux et moi mais je ne les crains plus autant. Je me sens un peu comme Momo de La Vie Devant Soi de Romain Gary, à jouer à l'ethnologue de sa résidence, d'ailleurs la place portant le nom de l'auteur est tout proche. Hasard bien sympathique. Dans ma résidence pas de communautarisme, juifs, arabes, blancs, noirs, asiatiques se côtoient. Immigration récente, immigration anciennes, musulmans, catholiques, athées, orthodoxes. Ce n'est pas toujours idyllique ,certains vieux blancs installés ici depuis plus de 40 ans ont eu du mal à voir des "étrangers" venir vivre à côté d'eux. Même eux je les aimes ces petits vieux remplis de préjugés mais jamais hostile. Les préjugés se corrigent petit à petit, l'Habitude, l'Habitude. Et Jacqueline ma voisine du septième qui me dit un jour "Moi les autres là qui se plaignent qu' il y ait de plus en plus de noirs et arabes ici, maintenant je leur rétorque que si nous n'étions pas venus chez eux en premier les pauvres seraient jamais venus chez nous, voilà c'est tout, tu sais moi j'ai toujours été comme ca je suis franche un point c'est tout".
L'affrontement le plus récurrent en réalité et le plus drôle tellement il est cliché, est celui entre les vieux qui veulent leur saint silence et les enfants qui s'amusent dans la cour de la résidence. De temps en temps alors un vieux sort sa tête de la fenêtre et pousse un coup de gueule, avant les enfants ne répondaient rien, et laissaient faire, j'étais de ceux-là, nous étions très peu d'ailleurs en ce temps là;  mais maintenant qu'il y a beaucoup plus d'enfants dans la résidence, une résistance s'est organisé on assiste à de réels affrontements verbaux et une des insultes favorites des enfants est "sale raciste"...
Cette digression n'était pas censé être aussi longue, je voulais juste accompagner cette playlist d'un petit texte inspiré du titre La Vie Devant Soi référence au roman de Romain Gary. Les quelques morceaux que vous trouverez dans cette playlist exprime à la fois cet aspect cosmopolite que j'affectionne et que je viens de vous décrire, mais aussi l'ironie du titre de ce roman de Gary qui fait écho à mon état actuelle. On a souvent tendance à dire qu' on a la vie devant soi pour réaliser ses projets. Cette formule plutôt optimiste m'apparaît de plus en plus comme surfaite. Par exemple, je pensais il y a encore 4 ans, que quand j'aurais 17 ans, j'aurais déjà réaliser plein de mes projets tel écrire un livre, tourner dans un film, posséder une grande culture, voyager, jouer d'un instrument (, chanter dans un groupe... J'ai maintenant 17 ans et aucun de ses projets ne s'est concrétisé, alors au début je me répète que j'ai encore le temps, et puis je me questionne: si je ne les ai pas réalisé jusque là qui dit dans cinquante ans je les aurais réaliser? Est-ce que à ce moment là je continuerais à me dire "j'ai encore le temps"? Non, je serais submerger de regrets. En réalité cette formule "avoir la vie devant soi" est d'un optimisme rose bonbon trompeur et s'y enfermer c'est vivre dans une projection constante de soi futur, en remettant toujours tout à demain. On a tendance à toujours tout remettre à demain en pensant avoir le temps, or le Temps n'a que faire de nous et de nos projets, le temps ne s'adapte pas à nous, c'est nous qui devons nous adapter à lui. Une fois que l'on a dépassé l'aspect trompeur de cette formule, elle peut alors être optimiste. Avoir la vie devant soi ce n'est pas seulement se projeter dans le futur lointain et vague  mais dans celui proche et avant tout dans le présent, en se débrouillant avec ce qu'on a. Ainsi je rechignais au début à écrire sur ce blog car je ne trouvais pas le design assez sophistiqué, je me disais que lorsque j'aurais améliorer ca et ca, je pourrais écrire, sauf que je suis nul en langage html etc c'est pas mon délire, et finalement le design ce n'est pas la raison pour laquelle j'ai crée un nouveau blog, ce que je veux moi c'est écrire et partager mes réactions, mes créations, mes réflexions. Et finalement qu'elles soient lues même par une seul personne me fait déjà énormément plaisir. Donc maintenant j'ai pris la décision d'écrire plus, mais vu que j'aime bien préparer mes articles par de la documentation (enfin sauf ceux de ce type bien sûr) cela prend un peu plus de temps.
Autre exemple, depuis 3 ans environ, je dis que je vais m'acheter un Canon 600D qui me permettrait notamment de faire des courts-métrages, sauf que je ne l'ai toujours pas, mais par contre j'ai plein d'idées, dont une récente qui me tiens à cœur. Dois-je attendre encore? Me projeter dans le futur et finalement abandonner ce projet ? Non. C'est tous ces sentiments, ces réflexions , ces moments de joies et d'ennui de cette fin du mois de juillet passé à Paris, que cette playlist reflète. Bonne écoute si ce n'est déjà fait.

Belva


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